Pour les spécialistes du cerveau, si le comportement du joueur est comparable à celui du toxicomane, le processus biologique diffère. Si les psychiatres sont quasiment unanimes pour parler d'addiction aux jeux en ligne, les neuroscientifiques sont, quant à eux, beaucoup plus réservés. Jean-Pol Tassin, neurobiologiste, directeur de recherche à l'Inserm et professeur au Collège de France, rappelle que la dépendance est un «phénomène dû à une modification des réseaux neuronaux que l'on peut obtenir avec une utilisation répétée de certains produits (drogue, alcool, morphine)».
Si les médecins militent pour que les joueurs pathologiques soient considérés comme dépendants, c'est «parce que la reconnaissance d'un comportement addictif donne accès à l'obtention de crédits de la part des pouvoirs publics, à la création de postes universitaires et à la mise en place d'expérimentations pharmaceutiques», déplore Serge Tisseron, psychiatre et directeur de recherche à Paris-X.
Dans la revue américaine «Psychiatry» (février 2009), le Pr Ronald Pies, de l'université de Boston, posait la question suivante:
Faut-il classer l'«addiction» à Internet dans le DSM (l'outil de classification des troubles mentaux réalisé par la psychiatrie américaine) comme une maladie à part entière?
«Pour l'instant, on ne sait pas si cette dépendance est la manifestation d'un problème sous-jacent ou une maladie en soi», écrivait Ronald Pies.
Il concluait qu'il était, pour l'heure, impossible de considérer l'addiction à Internet comme une maladie spécifique.
Jean-Pol Tassin ne dit pas autre chose quand il rappelle que 60% des joueurs pathologiques ont une addiction antérieure (alcool, tabac) et que 30% ont des troubles de la personnalité.
Pour Pier Vincenzo Piazza, chercheur au Neurocentre Magendie de Bordeaux, «le comportement du toxicomane consommateur de cocaïne est le même que celui du joueur pathologique. Le jeu contrôle le comportement du joueur comme la drogue contrôle celui du toxicomane. Mais si le symptôme est similaire, le processus biologique diffère.» En résumé, pour les neuroscientifiques, dire que les jeux créent une addiction est un raccourci.
Du coup, quand ces chercheurs travaillent sur les mécanismes du cerveau pouvant aboutir à une dépendance, ils étudient les effets neurologiques de la cocaïne. Pier Vincenzo Piazza et Olivier Manzoni viennent de publier un article dans la revue américaine «Science» (24 juin 2010) sur la vulnérabilité qui peut conduire certains à devenir toxicomanes. Il s'agissait de comprendre comment certains individus peuvent consommer de la drogue sans pour autant devenir toxicomane, tandis que d'autres vont plonger.
La réponse tient en un mot : la perte de plasticité synaptique. Autrement dit, les synapses répondent différemment selon les individus, et le cerveau d'un toxicomane perd en plasticité. «On l'observe d'ailleurs parfaitement chez les drogués : leur comportement est rigide, note Pier Vincenzo Piazza. Ils continuent à se shooter alors qu'ils savent que c'est dangereux et qu'ils ont du mal à s'en procurer.» Les chercheurs ont montré que chez les individus qui arrivent à se contrôler, la plasticité des synapses revient.
Tout cela parait un peu compliqué mais il aborde un autre point de vue que celui qui était publié dans ce post :
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